Il s’agit de viols de bébés et d’enfants, par dizaines. Pendant 3 ans, de 2013 à 2016, les petites victimes âgées de 8 mois à 12 ans ont été violées par une milice dans le village de Kavumu, dans la province du Sud-Kivu au Congo.
Alors qu’une dizaine de condamnations avaient été prononcées à l’encontre des prévenus (parmi lesquels un élu), nous avions publié un article en décembre dernier qui revenait sur les conséquences de ces viols systématiques sur le corps et l’esprit des victimes : Jacqueline Fall, A psychologist alongside traumatized children in Kavumu (DRC).
Les condamnés ayant fait appel, un nouveau procès s’est déroulé la semaine dernière :
Viols d’enfants dans le Sud-Kivu (#RDC) : les enjeux du procès en appel. https://t.co/M7EMmjjFst via @justiceinfonet #ViolsDeMasse #Kavumu
— TRIAL International (@Trial) June 20, 2018
On peut lire sur le site de la Fondation Hirondelle les déclarations de l’avocat des parties civiles qui espère que la Haute cour militaire confirmera le jugement de première instance :
Lors du premier procès, la culpabilité de Frédéric Batumike et ses co-accusés a été prouvée en faits et en droit. C’était une victoire pour la quarantaine de victimes que nous accompagnons. Nous espérons que la Haute cour va leur redonner espoir en reconduisant l’œuvre du premier juge. Notre souhait est de voir ce procès en appel être vite clôturé pour qu’on déclenche l’action de réparation en faveur des victimes. Elles en ont vraiment besoin pour leur reconstitution
Espérons que la condamnation à la perpétuité pour crimes contre l’humanité par viols et meurtres sera confirmée. En janvier dernier, nous avions rapportés les propos du Dr Denis Mukwege dans cet article (en anglais) : Kavumu: Child Rapes and Murders Declared Crimes Against Humanity in Landmark Case. Il a soigné les vicitimes de ces viols et il déclarait suite au premier procès :
Ce verdict donne l’espoir à la multitude des victimes silencieuses et traumatisées qui n’osent se plaindre faute de foi en notre justice. Ce procès de Kavumu est un message fort adressé aux dirigeants politiques, à tous niveaux, qui entretiennent des milices. Des milices qui tuent et violent les civils, attaquent les forces armées congolaises et les forces des Nations Unies. Des milices qui commettent des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité judiciairement imprescriptibles. Le message envoyé est clair, tôt ou tard la justice vaincra.
Le Dr Mukwege souligne aussi la très difficile reconstruction suite à ces viols, et plus particulièrement sur les bébés…
Il reste en suspens, l’épineuse question de réparations. La littérature scientifique ne nous éclaire pas suffisamment sur les conséquences des viols de masse chez les bébés. Il n’y a pas beaucoup d’études rétrospectives portant sur des bébés laissés en vie dans le contexte de conflits où le viol est utilisé comme arme de guerre. Pour certaines de ces enfants violées en dessous de l’âge de vingt-quatre mois, il faudrait non seulement leur assurer un suivi psychologique et médical pendant au moins les 17 ans à venir, mais aussi une évaluation complète des conséquences de ces viols avec extrême violence, sur leur sexualité, leur fertilité et leur comportement. Cela ne pourra se faire que lorsqu’elles atteindront leur majorité. Le processus de leur guérison ne fait donc que commencer.
A suivre le verdict du second procès.